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À l’évocation du mot « révolution », je pense tout d’abord à l’emblématique Révolution Française. Je pense à la merveilleuse Constitution de 1793, la plus progressiste de son temps, contenant la célèbre « Déclaration des droits de l’homme et du citoyen ». Cette Constitution ne fut jamais appliquée. Au lieu de cela, les Révolutionnaires mirent en place le régime de la Terreur et ses tribunaux d’exception qui décapitèrent à tour de bras. Je pense aussi à Olympe de Gouges, brillante rédactrice de la « Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne », décapitée dans la folie collective.

 

Ensuite, c’est une autre figure qui me vient à l’esprit, celle de Che Guevara, que d’aucuns considèrent encore comme un héro romantique, défenseur de la veuve et de l’orphelin, des pauvres et des opprimés. Che Guevara le guérillero qui n’a jamais hésité à user de la violence pour faire triompher ses idéaux révolutionnaires. Che Guevara, qui, à la suite de la Révolution cubaine fut nommé procureur d’un tribunal d’exception chargé d’exécuter militaires et policiers de l’ancien régime. Che Guevara qui contribua à mettre en place l’une des plus anciennes dictatures toujours en place à l’heure actuelle, avec son ami Fidel Castro.

 

Alors, me vient en tête cette phrase anodine prononcée par l’un de mes professeurs en plein printemps arabe : « Une révolution populaire n’est pas forcément démocratique. ».  Et je pense à ce printemps arabe qui a suscité tant d’attentes et d’espoirs, et qui pourrait très bien ne s’avérer être qu’un fétu de paille. Car il est possible, voire probable, que certains de ces peuples appelés aux urnes dans processus démocratique ne se choisissent librement un pouvoir encore plus tyrannique et liberticide. Ou bien alors, n’auront-ils droit qu’à des réformettes cosmétiques, avant que les choses ne reprennent leur cours d’avant. Mon intention n’est pas de jouer les oiseaux de mauvais augure, et je souhaite sincèrement que l’avenir proche me donne tort, mais les leçons de l’histoire ne m’incitent pas à l’optimisme le plus débordant.

 

Je pourrais citer d’autres exemples encore, à commencer par TOUTES les révolutions communistes qui ont débouché, sans exception, à la mise en place de dictatures jusqu’aux plus sanguinaires (Le Cambodge de Pol Pot ou la Corée du Nord, par exemple). Mais à ce stade, vous aurez sans doute compris où je veux en venir : Je ne crois pas à la révolution. Je pense que l’amélioration des conditions de vie, la liberté, la justice sociale, les avancées majeures et positives ne sont pas le fruit de révolutions. Elles sont au contraire la résultante d’un long processus d’évolutions.

 

Pour appuyer mon propos, je voudrais me référer à un autre type de révolution : la révolution industrielle que nous avons connue à partir de la seconde moitié du 18ème siècle. Cette révolution qui a attiré les gens des campagnes vers les villes en plein boum a mené à une dégradation considérable des conditions de vie des « petites gens » devenues classe ouvrière : exploitation, malnutrition, maladies, promiscuité, voisinage immédiat avec les déchets, conditions d’hygiène déplorables, odeurs infectes, nuisances sonores, atmosphère polluée, etc. Et ce n’est qu’en réaction à ces conditions de vie que se sont petit à petit mis en place les mouvements sociaux, comme les syndicats. Et ce n’est que dans l’instauration petit à petit, du dialogue social, d’avancée en avancée, au profit donc d’une lente évolution (toujours en cours) que les choses se sont lentement, mais sûrement et durablement, améliorées.

 

La révolution n’est pas la voie vers un monde meilleur, c’est la voie de l’extrémisme, du bain de sang, de la déraison totale. Comme je ne cesse de le répéter, il faut toujours prendre la mesure de l’Histoire, voir le chemin parcouru et estimer le chemin encore à parcourir, tout en étant attentif aux possibles (et inévitables) retours en arrière ponctuels.

 

Je ne crois pas à la révolution. Je crois aux évolutions. Ou à l’évolution, si on se place dans une perspective globale. Les évolutions se construisent patiemment, elles doivent s’appuyer sur des bases solides, des institutions. Elles sont le fruit tantôt de luttes acharnées, tantôt de dialogues menant à des consensus, des modus vivendi. Elles sont alors  inscrites dans les lois, les traités, pour ensuite percoler lentement dans les mœurs et la société. En somme, les évolutions nourrissent les lois qui à leur tour nourrissent de nouvelles évolutions. Bien souvent, les grands principes mettent longtemps avant d’être pleinement effectifs dans la vie quotidienne des citoyens. La « Déclaration universelle des droits de l’homme » ne date-t-elle pas de 1948 ?

 

Je pense que les améliorations nettes et brutales, la réalisation de grands idéaux humanistes d’un coup de baguette magique révolutionnaire sont impossibles. Tout comme il est stupide de penser pouvoir imposer la démocratie par la force comme le font les américains en Irak ou dans d’autres pays.

 

Je pense qu’il est tout aussi stupide de prêcher la révolution dans nos pays démocratiques, car cela revient à remettre en cause un long processus d’évolution, à remettre en cause des acquis fondamentaux, en une expression : à jeter le bébé avec l’eau du bain. Nos démocraties sont bien entendu largement perfectibles, il subsiste des injustices insoutenables, de graves inégalités et de honteuses atteintes aux droits de l’homme. Mais le processus est en cours, et il ne peut que s’appuyer que sur ses institutions, et l’amélioration progressive de celles-ci pour aboutir. Car tout remettre en cause, dans une sorte de cacophonie anarchisante, c’est risquer le chaos. C’est risquer la récupération de la révolution par l’un ou l’autre tyran charismatique. C’est faire fi des leçons du passé et courir tout droit à la catastrophe.

 

« Rome ne s’est pas faite en un jour. »

Tag(s) : #Société
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